Un mardi… en 2001…les tours jumelles s’effondrent. Tout le monde s’en souvient.
Après ce tragique 11 septembre, on nous a fait croire – même dans le monde académique – que tenter de comprendre reviendrait à justifier, à excuser. Mais comment trouver des solutions à un problème sans une analyse approfondie de ses causes?
J’ai voulu comprendre. Et pour cela …je suis allé parler aux premiers concernés, ceux qu’on appelle les « terroristes ».
Dans ma thèse, j’ai rencontré des sympathisants de Daesh, des anciens membres d’Al-Qaeda. Des personnes qui se disent djihadistes. Et j’ai croisé leurs récits avec ceux de militants qui luttent pour des causes similaires, mais de manière non-violente.
3 ans de recherche dans trois pays – au Liban, en Suisse, au Canada . une centaine d’entretiens, des observations et des immersions sur le terrain pour essayer de comprendre le pourquoi ? Pourquoi la violence ?
Après mes premiers entretiens, j’ai pris mon carnet et j’ai écrit :
Si tu pars à la quête du crime,
prépare-toi à trouver de la souffrance.
Car j’ai trouvé beaucoup souffrance, de douleurs, d’humiliation, vécues soit directement soit indirectement à travers les histoires de proches, les images à la télé, les vidéos qui circulent sur les réseaux sociaux : bombes, massacres, viols de femmes et d’enfants innocents.
Un va et vient entre analyses et entretiens, et l’image se clarifie : un profond sentiment d’injustice est au cœur de l’engagement dans la violence, qui semble d’ailleurs passer par trois phases-clés : identifier une injustice, s’approprier cette injustice, et se responsabiliser face à cette injustice. Dans une logique jusqu’au-boutiste, ces engagés veulent aller au-delà des seules paroles, et tout sacrifier pour leur idéal de justice.
…
Un de mes enquêtés m’a dit : Je suis un fan d’Oussama Ben Laden !
Ça semble incompréhensible. Comment vénérer quelqu’un qui se revendique de la mort de plus de 3000 civils ?
C’est parce qu’il se voit comme David, un humain, qui a marqué un coup contre Goliath – le monde occidental – grand, puissant, et violent. Exécutions extrajudiciaires, extraditions illégales, torture, la prison d’Abu Ghraib, le camp de Guantanamo. Si des chefs d’État peuvent accepter des soi-disant dommages collatéraux au nom de la sécurité, pourquoi lui – petit combattant – devrait-il épargner les civils ? Voyez-vous sa logique ?
Rien ne justifie de tuer des personnes innocentes, quelle que soit l’injustice ressentie. Si mes recherches mettent une chose en évidence, c’est que c’est la terreur qui fait naître la terreur. Quelle erreur donc de croire qu’on peut combattre la terreur par la terreur.
Or…
Un mardi…en 2003…une ville, Baghdad, s’effondre. Qui s’en souvient ?